Dans son mouvement autour du Soleil, la Terre se déplace dans un espace interplanétaire que l'on pourrait imaginer vide. Or, c'est loin d'être le cas. Au début de son histoire, le Système solaire était un gigantesque nuage rempli de gaz, de poussières et de débris rocheux. Si cet espace a été peu à peu nettoyé de ses plus imposants constituants qui se sont agglomérés pour former les planètes, quelques pourcents des particules les plus fines sont restés et continuent de remplir le disque dans lequel les planètes se déplacent. D'autre part, depuis sa naissance, cet espace a été aussi enrichi et réalimenté par divers objets : des éclats d'astéroïdes résultant de corps parents qui se sont percutés ou des nuages de débris laissés par le passage et la fonte de noyaux de comètes lors de leur voyage à proximité du Soleil. Ce sont ces derniers petits corps qui vont nous intéresser dans les lignes qui suivent.
L'orbite de la Terre passe régulièrement au travers de tels nuages laissés par des comètes lors de passages précédents. Lors de cette rencontre avec ces débris, ces derniers sont précipités vers notre planète à des vitesses de plusieurs dizaines de kilomètres par seconde, ce qui provoque leur vaporisation dans les hautes couches de l’atmosphère : ce phénomène furtif, mais brillant, provoque ce que l’on appelle une « étoile filante ». La rencontre avec l’un de ces nuages prend plusieurs heures ou jours. Si le nombre d'étoiles filantes est important, on parle de « pluie d’étoiles filantes ». Les objets à l’origine de ces phénomènes sont des fragments minuscules de matière solide, appelés « météoroïdes ».
C’est au mois d’août qu’a lieu l’une des plus célèbres pluies d’étoiles filantes : les Perséides. Ces dernières ont lieu au milieu de l’été, soit du 17 juillet au 24 août avec un pic (maximum d’activité) entre le 10 août et le 13 août. Cet essaim est connu, car les médias s’en font largement l’écho : le public visé est bien souvent en vacances, donc réceptif. Mais la raison tient aussi dans l’activité souvent importante de cet essaim.
Moins connu, car beaucoup moins relayé par les médias généralistes, l’essaim des Léonides mérite lui aussi que l’on s’y attarde. La traversée du nuage de débris intervient cette fois du 14 novembre au 21 novembre, avec un pic d’activité souvent dans la nuit du 17 novembre au 18 novembre.
Le corps à l'origine de ces Léonides est la comète 55P/Tempel–Tuttle. Il s'agit d'une comète dont la période orbitale est de 33 ans. Elle a été découverte indépendamment par Wilhelm Tempel le 19 décembre 1865 et par Horace Parnell Tuttle le 6 janvier 1866. Notons que c'est l’astronome italien Giovanni Schiaparelli (1835-1910) qui a découvert que l’orbite de cette comète coïncide avec celle d’un nuage de débris à l’origine d’un essaim d’étoiles filantes visibles en novembre. Il fait donc tout naturellement le lien entre la comète Tempel‑Tuttle et les étoiles filantes visibles chaque année en novembre et qui allaient devenir les Léonides. Cet essaim porte le nom de Léonides, car chaque météoroïde de ce nuage semble venir d’un point central appelé « radiant » et qui se situe dans la constellation du Lion (du latin Leo) !
Notons une particularité : la comète a un mouvement rétrograde autour du Soleil. Cela signifie qu'elle tourne dans le sens contraire des planètes. Par conséquent, la vitesse de rencontre des météroïdes avec la Terre est beaucoup plus élevée, de l'ordre de 70 km/sec, que pour celle des autres essaims (de 10 à 35 km/ sec). C'est une des typicités des Léonides : les étoiles filantes sont très rapides dans le ciel.
En novembre 2025, elle revient dans le système solaire interne. Son prochain périhélie est prévu le 20 mai 2031. Les météoroïdes que nous observons actuellement se trouvent devant la comète. La connaissance des mécanismes d'éjection de poussière et de l'évolution de la traînée nous a permis de prédire et de vérifier l'activité variable sur de nombreuses années jusqu'à récemment.
Le maximum nodal « régulier » des Léonides à la position connue λ⊙ = 235,27 devrait se produire le 17 novembre 2025, peu avant 18 h TU. Dans Maslov (2007), nous trouvons une date légèrement antérieure pour ce maximum : le 17 novembre 2025, à 10 h TU, correspondant à λ⊙ = 234,95 avec un ZHR prévu d'environ 10 à 15.
Rappelons que le ZHR (Zenithal Hourly Rate) d'une pluie de météores est la valeur maximale du nombre d'étoiles filantes qu'un observateur pourrait voir en une heure si le radiant se situait à son zénith sous un ciel parfaitement transparent.
Notons enfin que la Terre rencontrera la traînée de poussière laissée lors du passage de 1699 et peut-être aussi des traînées beaucoup plus anciennes.
Modélisation décrite dans l'article : deux rencontres de traînées de poussière encore plus anciennes peuvent être observées dans le modèle. Des paramètres légèrement assouplis pour la traînée de 1633 sont appliqués afin d'inclure la rencontre. Il s'agit d'un cas intéressant, car le graphique (figure 1) montre que la traînée est proche de la trajectoire de la Terre, mais que la densité numérique des particules est faible : la partie la plus dense se trouve encore un peu loin de la Terre pour provoquer une activité significative.
Nous sommes donc curieux de voir comment et si cela peut être détecté. Les observateurs doivent être vigilants pour surveiller toute activité éventuelle le 15 novembre 2025, vers 03hUT.
Une autre traînée de poussière extrêmement ancienne et fragmentée – éjectée en 1167 – s'approchera de la Terre dès le 9 novembre 2025, vers 22 h UT. La distance minimale sera légèrement inférieure à celle de la traînée de 1633 (figure 4). Néanmoins, nous ne sommes pas certains qu'elle sera observable. Mais qui sait, les Léonides sont pleines de surprises, et il vaut la peine de surveiller l'activité autour de cette position. Malheureusement, il y a une certaine interférence de la lumière lunaire à ce moment-là.
Résumé et conclusions
Nous résumons ici les dates possibles de rencontre avec la traînée de poussière des Léonides en 2025, par ordre chronologique :
- 9 novembre, 22 h UT (traînée de poussière de 1167)
- 15 novembre, 3 h UT (traînée de poussière de 1633)
- 17 novembre, 10 h UT (maximum nodal à λ⊙ = 234,95)
- 17 novembre, 18 h UT (maximum nodal à λ⊙ = 235,27)
- 17 novembre, 19 h UT (traînée de poussière 1699 à λ⊙ = 235,341)
- 17 novembre, 22 h 40 min UT (traînée de poussière 1699 à λ⊙ = 235,482)
À l'exception de la première rencontre répertoriée, toutes les autres peuvent être observées sans interférence de la lumière lunaire. Comme indiqué dans les descriptions ci-dessus, il y a de nombreuses inconnues et il n'existe pratiquement aucune donnée sur les traînées de poussière très anciennes. Par conséquent, toutes les données d'observation sont importantes, y compris celles couvrant d'autres périodes autour des dates indiquées. Cela inclut également les rapports qui documentent l'absence d'activité détectable dans ou autour de l'un des intervalles indiqués.
Comment observer les Léonides 2025 et que voit-on ?
Si l’observation d’un essaim d’étoiles filantes est théoriquement possible en ville, il est évident qu’on pourra dénombrer bien plus de ces traînées lumineuses à la campagne grâce à un ciel bien plus noir permettant d’en observer les plus faibles spécimens. L’œil nu est l’instrument idéal pour ce genre d’observation, tout autre instrument, même des jumelles, étant à proscrire du fait de leur champ bien plus restreint que celui de l’œil humain. Un transat sera lui aussi bienvenu pour assurer le confort de l’observateur dans la durée.
Contrairement à l'année dernière, et comme indiqué plus haut, la Lune va nous faciliter la tâche, puisque le dernier quartier de lune interviendra le 12 novembre 2025 et la nouvelle Lune aura lieu le 20 novembre. Autant dire que notre satellite naturel sera quasi absente dans le ciel au moment du maximum.
Si la météo est clémente sur la deuxième moitié de novembre, la chance sourira aux couches-tard. C'est en effet en deuxième partie de nuit qu'un observateur pourra voir les Léonides. Ces dernières seront le plus souvent fines, pas très longues et très rapides. Avec un ZHR à 15 /h, en prenant un radiant haut sur l'horizon (sin(h)=0.8), une magnitude limite à 4.5, ça fait 4 météores visibles par heure, soit une tous les quarts d'heure."





























