Retour sur l’éclipse totale de Lune du 21 janvier 2019

Éclipse totale de Lune du 21 janvier 2019
Éclipse totale de Lune du 21 janvier 2019. Crédits Jonathan Normand

Cette éclipse de Lune fut la première de l’année, mais aussi la dernière d’une série de trois éclipses totales consécutives. La prochaine série ne se reproduira qu’en 2025-2026. Ce fut aussi la dernière visible dans sa quasi-intégralité depuis le territoire métropolitain. Il faudra maintenant attendre celle du 20 décembre 2029 pour pouvoir à nouveau admirer le spectacle de la Lune rouge depuis l’Hexagone.

Ce n’est que lors d’une éclipse totale que la Lune prend une teinte rouge cuivrée plus ou moins intense. Elle se trouve alors inscrite dans sa totalité à l’intérieur du cône d’ombre projetée par la Terre dans l’espace. Dans cette ombre terrestre, il existe néanmoins une légère lumière rouge issue du rayonnement solaire qui a été filtré lors de sa traversée de l’atmosphère terrestre et dévié de son chemin vers l’intérieur de l’ombre. C’est la raison pour laquelle la Lune nous apparaît encore visible, simplement teintée de rouge. C’est la « Lune de sang » comme disent les anglo-saxons.

Pour qu’une éclipse de Lune ait lieu, il faut nécessairement que le Soleil, la Terre et la Lune soient alignés. Ceci exige que la Lune soit alors pleine, moment où son éclat est maximal, à tel point qu’il est alors possible de se diriger la nuit sans le secours d’aucune autre source de lumière. Durant l’éclipse, la Lune va se soustraire petit à petit à l’éclairage solaire, de telle sorte qu’au plus fort de l’éclipse, lorsque la Lune se trouve au plus près du centre du cône d’ombre, sa luminosité chute considérablement. Dans le cas présent, elle a été divisée par 20 000 (fig. 1. Une chute de 10 magnitudes est équivalente à une luminosité 20 000 fois moindre).

Chute en magnitude
Fig. 1. Chute en magnitude enregistrée durant l’éclipse. Crédits Pascal Descamps

Photographier une éclipse de Lune exige donc de modifier les temps de pose pour chaque phase de l’éclipse. Ainsi, l’image composite présentée a été réalisée depuis le toit du bâtiment historique de l’Observatoire de Paris, avec des temps de pose de 1/1000 s hors éclipse, jusqu’à 6 s durant le maximum de la totalité, pour une sensibilité de 800 ISO, avec un objectif de 600 mm ouvert à f/8 (conférant une résolution du pixel de l’image de 2,099″. Autrement dit, les plus petits détails visibles de la surface lunaire ont une taille de 3,6 km environ). Il est à noter qu’à la fin du phénomène, la Lune s’approchant de son coucher était très basse sur l’horizon. De ce fait, bien que retrouvant la lumière du Soleil, son éclat était bien moindre qu’avant son entrée en éclipse. Cela provient de l’absorption de la lumière lunaire qui doit alors traverser une épaisseur d’atmosphère bien plus importante pour parvenir jusqu’à notre œil (on perd ainsi plus d’une magnitude comme le montre la figure). C’est aussi la raison pour laquelle l’atmosphère diffuse – c’est-à-dire disperse dans toutes les directions – avec beaucoup plus d’efficacité les rayons de couleur bleu-vert composant le spectre de la lumière solaire pour ne laisser passer au final que le rayonnement allant du jaune au rouge, relativement indifférent aux effets dispersifs de l’atmosphère. La Lune se teinte alors d’une parure jaune-orangée.

La phase de totalité de l’éclipse du 21 janvier 2019 avait une durée de 62 min, c’est le temps durant lequel le disque lunaire est resté à l’ombre du Soleil. La durée d’une éclipse dépend de beaucoup de facteurs, le plus important étant le positionnement de la Lune par rapport au centre de l’ombre. La phase de totalité des plus longues éclipses peut aller jusqu’à 1 h 47 min lorsqu’au maximum de l’éclipse la Lune se retrouve exactement au centre de l’ombre. Ce n’était pas le cas pour l’éclipse du 21 janvier (fig. 2). Une autre condition importante tient à la proximité plus ou moins grande de la Lune avec la Terre. L’orbite lunaire est une ellipse et non un cercle, de ce fait la distance de la Lune à la Terre varie constamment. Lorsque la Lune se trouve dans sa position la plus éloignée de la Terre, à près de 406 700 km, elle nous apparaît plus petite dans le ciel et se meut aussi plus lentement le long de son orbite, de sorte qu’elle met en définitive plus de temps à traverser le cône d’ombre. C’est exactement l’inverse qui s’est produit pour la présente éclipse. La Lune était à une distance de 357 720 km, elle se déplaçait alors dans le ciel très rapidement (à une vitesse de 0,6° par heure, soit un peu plus de l’équivalent de son diamètre apparent en une heure). Précisons pour les puristes que le rayon de la section du cône d’ombre traversée par la Lune était de 0,76° pour un diamètre apparent angulaire de la Lune de 33,41′, soit un peu plus d’un demi degré sur le ciel). Il est maintenant entré dans l’usage de qualifier cette proximité d’une pleine Lune avec la Terre du titre de « superlune », encore une mode anglo-saxone dont nous avons hérité. Les superlunes volent toujours en escadrille. Celle-ci était la première des trois superlunes consécutives de 2019. Elles reviennent à intervalles réguliers d’un an et 48 jours.

Phases de l’éclipse
Fig. 2. Phases de l’éclipse. Crédits Pascal Descamps

Animation réalisée par Pascal Descamps et Jonathan Normand : déplacement de la Lune à travers les cônes de pénombre et d’ombre (~ 1 Mo).

Observation de l’éclipse avec la lunette Arago de l’Observatoire de Paris. Crédits Noémie Olive & Jérome Berthier
L’équipe des astronomes observant l’éclipse depuis le toit du bâtiment Perrault de l’Observatoire de Paris. Crédits Noémie Olive & Jérome Berthier
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