Titan, une lune de Saturne à l’expansion orbitale cent fois plus rapide que prévu
Une étude du mouvement de la plus grosse lune de Saturne, parue lundi 8 juin 2020 dans la revue Nature Astronomy, ouvre un nouveau champ d’investigation pour l’âge et la formation de ce système. Des implications pour de nombreux autres systèmes de satellites, mais également exoplanétaires (des planètes orbitant autour d’une autre étoile que le Soleil) et systèmes d’étoiles doubles, sont d’ores et déjà envisagées.
De même que la Lune s’éloigne chaque année de notre planète au rythme de 3,8 cm par an, la plupart des lunes du Système solaire fait de même sous l’action des bourrelets de marées qu’elles lèvent sur leur propre planète. Une partie du mouvement de rotation de la planète est alors transférée vers l’orbite de la lune, repoussant peu à peu celle-ci vers l’extérieur.
C’est en utilisant les données de la sonde Cassini que les chercheurs sont arrivés à déduire, pour Titan, une expansion orbitale d’environ 11 cm par an, soit cent fois plus qu’attendu par l’observation d’autres lunes de Saturne. Pour ce faire, les chercheurs ont travaillé sur deux types d’observations. Un premier groupe, dirigé par un chercheur de l’IMCCE, a utilisé un ensemble très large d’observations de Titan commençant en 1886, et allant jusqu’aux dernières images de la sonde Cassini. Un second groupe, mené par l’université de Bologne, a concentré ses efforts sur une dizaine de rencontres proches entre Cassini et Titan. Dans ce dernier cas, il est possible de déduire la position dans l’espace de Titan avec quelques centaines de mètres de précision. En comparant leur mesure, les deux groupes sont arrivés à un résultat identique, et très surprenant : Titan s’éloigne de Saturne beaucoup trop rapidement. Enfin presque… Car en 2016, Jim Fuller, travaillant actuellement au Caltech (Californie), avait prédit une telle accélération, comme conséquence du refroidissement interne de Saturne. À la différence du système Terre-Lune, Saturne est essentiellement une grosse boule de gaz. La physique qui régit son intérieur est donc très différente de celle à l’œuvre dans les corps rocheux.
En confirmant la théorie de Fuller et co-auteurs, les chercheurs viennent d’ouvrir la porte à un réexamen de nombreux objets astrophysiques, allant des lunes de Jupiter aux systèmes d’étoiles multiples, sans oublier les nombreuses planètes gazeuses évoluant autour d’une autre étoile que le Soleil.